23/07/2015
Film : NOS FUTURS - Le 23/07/2015
Vu hier soir le film NOS FUTURS. Le personnage central est enfoncé dans la trentaine et s’ennuie. Grand classique du moment. Il est riche mais triste parce qu’il a connu trop tôt la mort de gens trop proches. Alors il rêve d’une redite de son adolescence vécue dans la fête et le voyage afin de se soigner. Là aussi, comment s’étonner de ses pansements à une époque où tout le monde « adore voyager et faire la fête » ?
Son voyage initiatique ne revisite les codes du genre que parce que le garçon est plus vieux que le traditionnel héros vagabond. Rien à voir avec le Bildungsroman, mais tout à faire avec le Bobdungroman puisque ce bobo froissé sillonne les routes de France de cépage en bocage au milieu des moutons. Clichés rigolos parce qu’il ne quittera jamais à 35 ans ses 100 m² haussmanniens d’où il est si doux de se plaindre d’une vie qu’il aime tant. Il est ce parisien actuel qui hait tellement son existence qu’il l’aime de la haïr. C’est tordu à la façon des corps sans force de cette jeunesse occidentale coulante de faux sentiments. Alors le type n’étonne personne lorsqu’il jette ses deux portables dans un étang comme si cela le rapprochait de la nature où il rêvait d’habiter gamin. NOS FUTURS vit par à-coups d’un simili-romantisme qui indique la nature comme refuge, mais le bob du XXIème siècle n’a pas la crédibilité du jeune Werther. C’est un ahuri ennuyant qui n’ennuie que lui. Il descend de ses songes comme le singe qui y remonte aussitôt.
Le héros de NOS FUTURS est donc l’urbain en vogue en Occident. D’apparence cultivé, il lit un livre par an. Mou comme son gland qu’il utilise pour « faire un enfant », quand les menstrues sont calibrées pour, il ne fait pas de sport. Il montre deux petits seins de femmes sous des clavicules mangées par des épaules flasques. Sa bouille est chiffonnée, les cheveux lui tombent et la barbe est fatiguée. Pourtant, c’est cette fiotte qui plaît. Elles se battent pour lui. La virilité n’attire plus que les femmes de nos passés – nos futurs ont évacué la force dont la société n’a plus besoin. Il est donc normal que la bob society se tourne et tourne ses femmes avec elle vers le faible qui, dans le film, est marié à une fille splendide et d’autant plus splendide qu’elle l’aime sincèrement (et son argent peut-être). Ce brave ne rit jamais, l’humour lui est étranger, et pourtant, une beauté est prête à tout pour lui. C’est sans doute qu’il a le physique à la mode, laquelle situe le charme chez le flandrin au visage bouilli. Je l’imagine aller et venir sur le matelas en couinant comme un adolescent que la malbouffe et le robinet pollué de contraceptifs ont stérilisé. Le type de NOS FUTURS est le visage d’une humanité diminuée par une civilisation qui pense à l’augmenter – le transhumanisme n’est-ce pas : mais quand je vois ce genre de bonhommes, je me dis que l’humain trans existe déjà.
NOS FUTURS a ceci d’intéressant qu’il décrit le sérieux de la classe de loisir qui est la petite-bourgeoisie. Le personnage principal n’est ni un festif ni un fêtard. C’est un mélancolique illettré qui joue mal un personnage qu’il s’est bâti pour « faire genre ». (L’acteur est remarquable dans sa manière de suggérer les nuances de cette chiffe). Néanmoins, il sait s’entourer de fêtards qui prennent la vie avec le sourire de la maturité. Le sens du tragique est réel chez ces trentenaires dont l’éducation a échappé à la décadence que les années 2000 ont accélérée. Ils savent que la fête est nécessaire pour oublier l’absurdité de l’existence. Bacchanale et fête des fous, de tout temps, la civilisation a pratiqué la fête d’autant plus violemment qu’elle est rare. Au vrai, c’est la génération adolescente qui ne sait plus faire la fête parce qu’elle la fait tout le temps. En sorte que son quotidien est uniment festif et que le petit-bourgeois moderne est le festivus identifié par Philippe Muray. Sa joie est industrieuse et il n’est donc pas étonnant qu’un beau spécimen, en l’espèce le fils de douze ans d’un des trentenaires, soit choqué par la folie de ses pères de génération lorsqu’ils décident de secouer sa soirée plombée par l’habitude qui est devenue une obligation de fêter. Moralité de ces scènes rafraichissantes : les générations savent de moins en moins faire la fête. Les fêtards disparaissent tous les 20 ans. C’est un esprit qui meurt progressivement avec une civilisation qui n’a de cesse d’uniformiser les caractères en ne perpétuant que le festif. Les rêveurs sont moqués. C’est qu’il s’agit d’être festivement rangé comme le gamin de douze ans qui compte sur son stage en banque pour « monter haut » (sic). Que son père lui feutre une bite sur le front est aussi savoureux que la panique du gourdiflot qui « ne [réussira] pas avec ca sur la tête ». Mais ainsi va le bob monde et son air consommé de la party fine...Peut-être faut-il accepter ce sort comme le suggère la fin qui s’ouvre sur une porte où est écrit AMOR FATI – l’amour de son destin, la phrase de ce bon vieux Nietzsche qui conseille de se soumettre à et de vouloir cette force qui nous veut d’abord, puis qui veut que nous la voulions ensuite ; peut-être oui, peut-être que la volonté de puissance ne réside plus que dans la passivité jamais dépassée, donc ailleurs que dans l’action. Il vaut mieux entreprendre. C’était déjà l’idéal bourgeois. Puis investir, c’est le plus grand loisir. Investir, donc, dans un mélange de bob dynamique à la ville, i.e. en entreprise aux fins de plaire au patron, et s’abîmer aux champs dans le chétif mollasson , i.e. en privé pour y séduire la donzelle. Alors ce seront NOS PRESENTS.
L'Aristo dit qu'il ne voit ni charme ni beauté dans cette tête de bob
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