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20/04/2015

Aveux oubliés dans l'habit - Le 20/04/2015

Pat Poker

      Les livres. Ca peut m’arriver d’en lire plusieurs en même temps mais pas plus d’un ou trois. C’est très rare. Je les finis toujours. Je suis discipliné. Devenir écrivain donc je m'opiniâtre à atteindre cet objectif. Je ne le suis pas encore. Je reste un rigolo à peine impétrant. Je crois du reste que je le serai toujours : comment me mesurer aux Anciens, c'est-à-dire à ceux qui avaient trente ans dans les années soixante, lesquels connaissaient encore leurs classiques ? J’ai des lacunes. Il faudrait avoir lu tout de Sophocle et d’Eschyle puis de leurs épigones que sont Corneille et Racine. Il faut ajouter Molière. Le Grand Siècle est fondamental. Je l’ignore trop. Le Cardinal de Retz et les mémoire de Saint-Simon.

Je suis assez dissipé dans l’imagination, tout feu tout flamme, mais ma discipline contient mon débridement qui permet l’inspiration. L’inspiration est un ordre donné au chaos de l’imagination, voilà ce que je crois. L’inspiration est permise par la méthode, qui peut être dépassée par le génie qui reste un accident ou une chance à condition qu’il ne soit pas compris comme une malédiction. Descartes : « je n’ai pas plus de génie que les autres mais j’ai plus de méthode ». Je m’instruis dans ce principe. C’est le même par quoi Céline s’est élevé. Halluciné de travail lui, un forçat de la page. Je suis un ouvrier de la ligne, c’est-à-dire que je lis un livre par semaine ce qui n’est pas suffisant ; j’écrirai un roman une fois que je serai convaincu que j’aurai assez lu. Pour l’instant, je m’en tiens à la rédaction critique. A quoi s’ajoutent quelques nouvelles et des récits de voyage ; tous prendront leur essor une fois qu’un roman aura propulsé mon nom. C’est le plan. Mes écrits sont orphelins de mes livres et attendent leur messie.

Je fais peu de cas de ceux qui veulent écrire sans lire : moins d’un livre par semaine est une insulte à la création. La lecture dope l’écrivain qui lit mieux à proportion qu’il écrit bien : c’est un cercle vertueux ou la dialectique de l’œuvre. Or je doute que les écrivains d’aujourd’hui lisent autant.

Le sport me renforce dans cette conviction que l’effort est le goût du dépassement de soi. Les idées viennent debout et naissent du choc du corps et des éléments.

Léon Daudet établit une théorie de l’ambiance dans quoi l’artiste est baigné si entier qu’il en extrait les sens. Michel Onfray parle de communion avec le cosmos d’où il tire une sagesse suggérée par l’ordre naturel. Or je n’accède à l’ambiance et au cosmos que par le sport en sorte qu’il est le moyen de ma littérature qu’il nourrit d’impressions. Une fois agencées par les mots, celles-ci se défont de l’idée de sensation primaire et en révèlent les secrets. La contemplation est une lutte frottée aux instincts que se partagent les hommes et la terre. C’est le sens du Toute vie est une professé par l’homme de Nazareth.

Le monde se connaît dans l’affrontement que prépare l’ascèse de l’esprit et du corps. Antique rengaine qu’il faut encore appliquer ; la trompeter ne suffit pas, sinon c’est taquinerie.

Francois Sanders dans LES EPEES : « Je suis capable de solitude, je ne suis pas solitaire ». Chronique de l’isolement dans quoi je trempe ma personnalité. Je n’en tire aucune fierté ; en ressort uniquement l’espoir d’écrire un grand livre ; en parallèle, je m’agace du reproche que la modernité adresse au retrait anticipé. Qui parmi les écrivains modernes, pour peu qu’il fût bien fait, accepterait de ne pas profiter de sa mise et de s’enfermer dans le néant ? Personne, je sais. Le sacrifice rend supérieur au regard de l’Histoire mais débiteur du présent. Le contemporain dit : « Je suis coupable de solitude, je ne suis pas solitaire ».

D’aucuns me taxeront de ridicule. Soit. J’ai suffisamment de raison pour doser mon caractère. Tu es bizarre j’entends, comme si la réplique de Louis Jouvet ne se léguait que le soupçon après avoir abandonné son humour à l’archimodernité. Celle-ci ne rit qu’à ce qui lui est indiqué. L’agora reproduit l’esprit du plateau télé où un chef de smile ordonne au public de se marrer et d’applaudir au juste mot, celui qui est toléré, au détriment du bon mot, toujours intolérable. L’injonction de rigoler cache le reproche du consensus formulé à celui qui ose. Comme c’est osé ! geint-on au premier dérapage. Alors oser ne plus se montrer au temps du narcissisme, on imagine le scandale, n’est-ce-pas. Quel est ce fou ? Il est étrange. Il fait peur.

L’ambiance du jour est une douairière raidie sur place, exactement celle à qui bob ressemble en s’employant à la moquer. Elle s’offusque de ce qui contredit ses « petits côtés ». Elle rattrape tout ce qui ne se fond pas dans la masse et entend subjuguer l’isolé. De là que par contamination politique les zigues veulent rendre le vote obligatoire. Et ma main c’est sans-culotte ? Au clair de la lune, j’ai lâché dans l’urne. Des gens sont morts pour ca. Et d’autres pour le contraire. Donc ce n’est pas un argument.

Il n’est de taquinerie que dans la réponse, jamais dans l’attaque. Ce n’est pas étonnant que les bretteurs s’y entendent davantage à parer qu’à porter. Le coup est fruste, sans panache. C’est moins un don qu’une perte de soi, et c’est dans ces coups sans cesse infligés à la paix des méditants que l’époque s’abîme. Elle est bruyante au point qu’elle est vulgaire. Il paraît que le silence sera un luxe. Les pubards ne s’y trompent lorsqu’ils vantent les paysages au tout luxe, calme et volupté. C’est bébète mais a le mérite de rappeler que c’est encore et toujours dans l’esquive que réside le salut. Là je vais sinon je n’écrirai jamais rien.

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L'Aristo s'incline devant son suzerain en littérature disparu trop tôt et dit qu'il faut lire son journal.

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